jeudi 10 février 2011

Porc, épisode 2 : achat

« Tout est bon dans le cochon. »
Certes, à condition qu'il soit bon.


L'achat d'une viande de porc de qualité n'est pas une mince affaire. Il existe bien un label rouge général, mais il est assez peu contraignant pour que des industriels comme Fleury Michon puissent l'adopter pour une partie de leur gamme : croissance modérée (100 kg en 182 jours, soit à peu près la moyenne générale), alimentation équilibrée (mais composée des mêmes céréales et oléagineux), un peu plus d'espace (soi-disant 12 m² à partir de 80 kg, mais j'ai des doutes sur le respect de ce critère), un accès à la  « lumière naturelle » (manière hypocrite de dire que l'élevage en bâtiment est compatible avec le cahier des charges), des conditions de transport et d'abattage contrôlées (c'est la moindre des choses). Résultat : d'après la revue Réussir Porcs (sept. 2010), le label rouge représente 3% de la production nationale, 10 % des éleveurs labellisés offrent de la paille à leurs cochons, et moins du quart pratiquent l'élevage en plein air.
Les labels rouges régionaux sont généralement plus sérieux, mais ils ne sont distribués que localement ou par des commerçants très pointus.
On en revient toujours à la même conclusion : rien ne vaut de bons fournisseurs en qui l'on aura confiance pour acheter des bêtes de qualité et les transformer avec soin.

Viande fraîche
La viande fraîche est vendue par les bouchers, les bouchers-charcutiers (dont la viande fraîche doit représenter plus de 50% du chiffre d'affaires) et les tripiers, ces derniers se limitant aux abats (parties de l'animal ne touchant pas à l'os). Les meilleurs viandes sont issues de porcs élevés en plein air, dans le respect de l'animal et de l'hygiène, avec une alimentation variée et des conditions d'engraissement modérées, et abattu à 182 jours minimum. La chair est alors d'un rose prononcé, le gras d'un blanc immaculé. C'est une viande dense qui rendra peu d'eau à la cuisson, ce qui autorisera de longs braisages ou rôtissages où les saveurs se concentreront sans perte de moelleux.

Découpe du porc (à la française) et cuissons de la viande fraîche

1. tête - 2. lard gras - 3. échine (ou carré découvert) - 4. palette - 5. côtes premières (ou carré couvert) - 6. côtes de filet (filet si désossé) et filet mignon - 7. pointe  8. jambon - 9. jambonneau arrière - 10. poitrine - 10a. travers - 11. épaule 12. plat de côtes - 13. jambonneau avant - 14pieds - 15. gorge - 16. queue.

Usage
Morceaux
En grillade (barbecue)
côtes, travers, plat de côtes, échine, poitrine, pieds (après pochage)
À la poêle
filet, filet mignon, pointe de filet, côtes, échine
En rôti
carrés, filet, filet mignon (entier), pointe de filet (entier), épaule, palette, échine
Poché (potée, choucroute, etc.)
pieds, jambonneaux, palette, épaule, travers, poitrine, plat de côtes
Braisé, mijoté
poitrine, échine, filet, filet mignon, épaule, palette, jambon


Charcuterie et salaisons
Un seul mot pour décrire tant de réalités ! Quoi de commun entre l'artisan-charcutier, fabriquant tout ce qu'il vend à partir d'un porc de qualité, et l'ignoble charcuterie industrielle qui écoule les trois-quarts du cochon breton d'élevage intensif. Encore faut-il pouvoir les distinguer... Lorsqu'un petit charcutier de quartier ou de marché vend de la camelote fournie sous cellophane ou sous vide par les industriels, sans rien en dire à ses clients, il est triplement coupable : tromperie, marge excessive et qualité médiocre. Cela ne donne pas envie de défendre le petit commerce de détail. Après de longues recherches, j'ai fini par dénicher une très sérieuse étude qui montre que la moitié des produits commercialisés par les charcutiers et les bouchers-charcutiers (prétendus artisanaux) proviennent de l'industrie. Face à ce scandale, comparable à celui des restaurateurs commercialisant du prêt-à-manger au lieu de faire la cuisine, il n'y a qu'une attitude possible : observer, se renseigner, poser franchement les questions qui dérangent (« Cette terrine est-elle maison ? »), et boycotter les malhonnêtes
Dans certains cas pourtant, on aime qu'un charcutier se transforme en intermédiaire : lorsqu'il vous fournit certaines spécialités régionales provenant des meilleures sources, en particulier les salaisons et la charcuterie sèche : jambons crus ou fumés, saucissons, andouilles, etc. 
Pour tout le reste, seule la fabrication artisanale sur place mérite que l'on dépense un peu plus que dans une grande surface : jambons blancs, boudins, saucisses, terrines et pâtés artisanaux doivent être faits à partir de viande fraîche, par petites quantités, et ne contenir aucun conservateur ou colorant. Sinon, autant les faire soi-même ! Et d'ailleurs pourquoi pas, si l'on a de bonnes relations avec son charcutier, et qu'il est prêt à vous sacrifier un peu de gorge de porc, de barde et de crépine ? La charcuterie maison n'est pas si difficile, et je vous livrerai bientôt quelques recettes testées et approuvées.

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